Les apparences , film de Marc Fitoussi
Critique à retrouver sur La-Croix.com
Après des comédies, Marc Fitoussi s’essaie au thriller, mais réussit mieux sa chronique d’un milieu de notables français à Vienne.
Les Français à l’étranger forment souvent de petites communautés soudées : loin des leurs, ils se recréent une famille qui atténue les effets négatifs du dépaysement. Ce noyau est d’autant plus solidaire qu’il réunit de grands bourgeois, éduqués depuis l’enfance à entretenir leurs réseaux.
Au centre des Apparences, se trouve le couple d’Henri, chef d’orchestre à Vienne qui vient d’apprendre sa reconduction pour deux ans à son poste prestigieux, et d’Eve, directrice de la bibliothèque de l’Institut français de la ville. Leurs fonctions font d’eux deux figures incontournables du petit groupe de Français vivant dans la capitale autrichienne, d’autant qu’ils composent aux yeux de tous une famille idéale avec leur fils Malo. Mais Eve se met soudain à soupçonner son mari d’infidélité.
Sous la chronique, le thriller
Marc Fitoussi dépeint avec une vigueur acerbe le petit monde des « expats », avec ses soirées mondaines et ses rivalités, ses solidarités et ses coups bas. Derrière la chronique, surgit le thriller, fondé sur un roman suédois, Trahie de Karin Alvtegen qui a pour cadre Stockholm mais peut être transposable n’importe où.
Eve organise une vengeance froide lorsqu’elle découvre l’amante d’Henri. Mais dans son désarroi, elle a passé une nuit avec Jonas, un jeune homme qui s’éprend d’elle et n’entend pas la perdre. Les trajectoires des membres de ce quatuor vont se télescoper dans des rebondissements délestés de tout souci de vraisemblance.
Le scénario montre de manière juste un certain antagonisme de classe. Mais à l’instar des expatriés obsédés par les apparences et du qu’en-dira-t-on qu’il décrit, il entache ses personnages les plus modestes, Jonas et la maîtresse d’Henri, d’une faute originelle dont ils ne pourront se défaire dans une logique assez nauséabonde qui exclut toute deuxième chance. Ainsi Jonas est désigné comme dangereux par le bracelet électronique qu’il porte à la cheville.
Restent une photographie superbe, la description acérée d’un cercle de privilégiés au bord de l’asphyxie et une belle distribution. Malgré leur capital de sympathie, Karin Viard et Benjamin Biolay qui incarnent ce couple usé à force de carcans ne parviennent cependant pas à rendre attachants leurs personnages.
Corinne Renou-Nativel, service culture La-Croix.com